En France, la stérilisation du chien est moins systématique qu’en Grande-Bretagne et qu’en Amérique du Nord. Elle est souvent proposée pour « calmer » l’animal, mais en pratique, la castration ou l’ovariectomie n’apporte pas toujours les avantages qu’on en attend.
La stérilisation ne dispense pas d’appliquer une thérapie comportementale adaptée aux troubles du comportement que le chien présente. Par exemple, lors de sociopathie interspécifique (flou hiérarchique entre le chien et ses maîtres), une thérapie de régression sociale dirigée doit être appliquée par les propriétaires.
Quelques certitudes
Plusieurs éléments semblent établis concernant l’agressivité chez le chien et pour appuyer la décision de stérilisation dans ce cas :
- les mâles consultent plus souvent pour agressivité que les femelles, ce qui conduit à dire que les mâles sont plus souvent agressifs que les femelles ;
- la stérilisation diminue l’agressivité chez le chien;
- la stérilisation d’une chienne qui voit son comportement modifié en fonction de son cycle oestral permet une stabilisation de son humeur.
La décision de castrer doit être motivée par des éléments cliniques
Toutefois, la stérilisation du chien ne doit pas être perçue comme une panacée, le remède à tous les troubles du comportement. Le tableau ci-après propose une synthèse sur ses principales indications de la castration et sur les troubles sur lesquels a priori elle n’aura pas d’effet.
La stérilisation n’est pas un acte anodin pour beaucoup de propriétaires, non seulement sur le plan financier, mais aussi sur le plan moral. Si cet acte se révèle inutile, c’est-à-dire si les troubles du comportement ne sont pas améliorés ou sont même aggravés après la stérilisation, les propriétaires auront l’impression d’avoir dépensé de l’argent pour rien et/ou que leur chien est décidément irrécupérable. La décision d’abandon ou d’euthanasie n’est pas loin, car leur motivation à poursuivre leurs efforts pour diminuer les troubles du comportement de leur compagnon (consultation de comportement auprès d’un vétérinaire comportementaliste, par exemple) sera émoussée, notamment en raison de l’aspect financier. Il serait donc plus judicieux que la prise en charge d’un trouble du comportement chez le chien commence par une consultation de comportement qui, selon les cas, pourra conduire à la décision de stérilisation.
La castration chimique chez le mâle par l’administration de progestatifs (acétate de delmadinone Tardak®, acétate de cyprotérone) ne permet pas vraiment de préjuger de l’action de la castration chirurgicale car les progestatifs ont une action centrale « calmante » qui mime les neuroleptiques, ce qui ne produit pas la castration qui supprime juste la principale source de testostérone.
Y a-t-il un âge limite pour stériliser ?
Que ce soit chez le chien ou chez le chat, chez les mâles ou chez les femelles, il ne semble pas y avoir d’âge limite pour la stérilisation, c’est-à-dire qu’elle sera efficace si elle est bien indiquée. Par exemple, la castration d’un chat de 5 ans peut modifier du jour au lendemain son comportement en le rendant sédentaire et en faisant disparaître le marquage urinaire d’origine sexuelle. Ce qui est assez logique puisque, même s’il y a une imprégnation des tissus par les hormones, notamment le système nerveux central, qui persistera, la durée de vie des hormones sexuelles dans le sang est courte (de l’ordre de 12 heures) : l’influence des hormones sur les systèmes de neurotransmetteurs (sétononine, surtout) sera modifiée et ce dans les jours ou semaines qui suivent.
Indications
- Agressions hiérarchiques liées à une sociopathie dans le cas où la thérapie de régression sociale dirigée associée à une médication a échoué. Dans le cas d’une sociopathie intraspécifique, la castration de tous les chiens du même sexe est préférable.
- Agression territoriale liée à une sociopathie dans le cas où la thérapie de régression sociale dirigée associée à une médication a échoué.
- Marquage urinaire lié à une sociopathie dans le cas où la thérapie de régression sociale dirigée associée à une médication a échoué.
- Chevauchement ou hypersexualisme
- Fugue lors de période de chaleurs (mâle ou femelle)
- Dysthymie de la chienne ou variation d’humeur en fonction du cycle (oestrus et metoestrus)
- Agressivité liée à une tumeur testiculaire
- En prévention chez une chienne présentant d’importants troubles anxieux ou un trouble du développement (Hs-Ha, syndrome de privation sensorielle, trouble de l’homéostasie sensorielle), car elle ne pourra pas bien materner ses chiots, donc cela engendrera des troubles du développement chez les chiots.
Troubles répondant peu à la stérilisation
- Agressions par irritation liée à une dyssocialisation ou mauvaise socialisation au chien
- Hyperactivité (Hs-Ha)
- Destructions (issues, objets volés) liée à une sociopathie
Troubles ne répondant pas à la stérilisation
- Peurs (phobies, syndrome de privation sensorielle)
- Agressions par irritation liées à
- une anxiété intermittente
- une hypothyroïdie
- une dysthymie
- Agression par peur liées à
- une anxiété intermittente
- une hypothyroïdie
- une dysthymie
- Agression de prédation
- Dermatite de léchage (anxiété permanente)
- Dépression
- Hyperattachement (primaire ou secondaire)
- Malpropreté liée à
- un défaut d’apprentissage de la propreté
- une anxiété intermittente ou permanente
- une dépression
- une hypothyroïdie
- Destructions liées à un hyperattachement
- Hypothyroïdie
- Syndrome de cushing
- Dysthymie non liée au cycle sexuel
- Syndrome dyssociatif
Références bibliographiques
Dramard. V. Vademecum de pathologie du comportement des carnivores domestiques. Ed Med-com. 2003.
Marion M. Influence de la stérilisation sur le comportement. Numéro spécial du Point Vétérinaire « Les traitements en comportement du chien et du chat » 2004. P 56-59.
Mège et coll. Abrégé Vétérinaire. Pathologie du comportement du chien. Ed Masson. 2003.
Pageat P. Pathologie du comportement du chien. Ed Point vétérinaire. 1998.